Un ancien préfet s’en va en guerre

Fils de Charles Paul et de Breard Émilie Aimée Charlotte, Henri Paul François Marie Collignon est né le 2 octobre 1856 à Caudéran en Gironde. Diplômé en droits, il occupe dans un premier temps des postes au sein de plusieurs cabinets préfectoraux, avant de devenir à son tour Préfet de la Corrèze.

Portrait Collignon

Portrait d’Henri Collignon – Collection privée

Le 21 décembre 1895, Henri Collignon est fait Chevalier de la Légion d’Honneur et continue sa brillante carrière de haut fonctionnaire. En 1906, il quitte ses fonctions de Préfet du Finistère pour se mettre en disponibilité. Pendant plusieurs années, il se consacre entièrement à ses livres et refuse tous les postes qui lui sont proposés. Il ne reprend sa carrière qu’en 1912, en devenant d’abord Conseiller Municipal de la ville de Saint-Georges-de-Didonne, avant d’être rappelé par le Président Armand Fallières pour devenir Secrétaire Général de la Présidence de la République Française à l’Élysée. L’année suivante, Raymond Poincaré est élu Président et Henri Collignon conserve son poste quelques mois avant de devenir Conseiller d’État.

Le 1° août 1914, la France décrète la mobilisation générale, mais le Conseiller d’État Collignon qui est âgé de 58 ans, n’est pas appelé. Il tient cependant défendre son pays et décide de s’engager volontairement en se présentant le 6 août au Colonel Malleterre, commandant le 46° Régiment d’Infanterie pour rejoindre cette unité. L’officier lui explique qu’il est trop âgé pour être enrôlé, mais Henri Collignon insiste en rétorquant que ce problème a été réglé en haut lieu et qu’il dispose déjà de son équipement. Malleterre fini par accepter et propose les galons d’officier au haut fonctionnaire qui les refusent et demande a être intégré comme simple soldat. Malleterre le nomme Soldat de 1° Classe et lui assigne la fonction de porte-drapeau du régiment. Avant de laisser partir sa nouvelle recrue, le Colonel lui demande pourquoi avoir choisis son unité plutôt qu’une autre, Collignon lui réponds en souriant qu’il voulait servir dans l’unité de la Tour d’Auvergne.

Collignon retour de Vauquois  mars 1915

Après plusieurs jours de combat, le 46° Régiment d’Infanterie arrive à Aubréville en mars 1915, le Soldat Collignon porte fièrement les couleurs du régiment – Presse d’époque – Collection E.M.

Malgré son rang et suivant ses instructions, l’ancien Préfet ne dispose d’aucun traitement de faveur. Il rejoint le front à pied, en partageant la soupe et le gîte de la troupe.

Les autres soldats sont surpris par la volonté de ce vieil homme comme le relate l’un d’eux dans son livre :

« Nous allions péniblement et machinalement comme des moutons derrière leur berger. Seul un homme nous montrait l’exemple de l’endurance. Équipe à ses frais, donc flambant neuf, un Soldat de 2° Classe engagé volontaire à 58 ans, ancien conseiller d’État, Monsieur Collignon, nous inspirait courage et confiance. De forte corpulence, portant beau en dépit des années, nous le vénérions déjà sans le connaître. Sa belle barbe blanche et, surtout la croix de la légion d’honneur qui ornait sa poitrine nous inspirait le respect. »

Extrait de Avec les bleus du 1° grenadier de France

Henry Jacques Hardouin

En Argonne, le régiment de la Tour d’Auvergne est déployé dans les secteurs de la Haute Chevauchée et de Vauquois.

Vauquois pendant la guerre - E.M.

Vauquois pendant la guerre – Collection E.M.

Le 15 mars 1915, les soldats de l’unité se trouvent dans des abris au pied de la Butte de Vauquois. Au cours de la journée, un bombardement éclate sur le secteur en surprenant plusieurs hommes. L’un d’eux s’effondre et appelle ses camarades à l’aide, Henri Collignon l’entend et s’élance sous la pluie d’obus pour le secourir, mais un éclat le blesse mortellement.

Coordonnées G.P.S. : N 49° 12′ 12,8″ – E 005° 04′ 17,4″

Henri Collignon a deux fiches « Mort pour la France » :

Première fiche « Mort pour la France »
Deuxième fiche « Mort pour la France »

Inhumé le 18 mars 1915 dans le carré militaire du cimetière d’Aubréville, le corps d’Henri Collignon est transféré, après la guerre son corps, à la tombe 1396 de la Nécropole Nationale de Vauquois, où il repose encore aujourd’hui.

Pano NN Vauquois - E.M.

Panorama de la Nécropole Nationale de Vauquois – Photographie E.M.

Au pied de la Butte, une plaque rappelle son sacrifice.

Bâtiment sur lequel est apposé la plaque commémorant le sacrifice d’Henri Collignon – Photographie E.M.

Plaque rappelant le dévouement du Conseiller d’État Collignon – Photographie E.M.

Une stèle sera aussi installée au  bord de la route menant au sommet de la Butte de Vauquois pour rappeler la vie et le dévouement de ce Conseiller d’État de 58 ans, qui s’est engagé volontairement dans l’armée pour défendre son pays comme simple soldat.

Stèle Collignon

Stèle rappelant le dévouement du Conseiller d’État Henri Collignon – Photographie E.M.